Bashung nous a malheureusement quitté, il reste Arno... C'est quoi le parallèle me direz-vous ? Deux rockeurs écorchés, maladivement timides malgré la célébrité, peu loquaces au quotidien, et pour lesquels les réponses sont à chercher dans leurs disques plutôt que dans leurs paroles. Brussld donc, quatorzième album studio du sieur Arno... Le disque s'ouvre sur "Black Dog Day", un rock rapeux et un poil bluesy, chanté en anglais. Arno nous surprend agréablement... Nous qui avions fini par ne plus prêter qu'une oreille distraite au rockeur Belge, découragé par certaines de ses productions... La suite ne nous décevra pas. Ce Brussld est un bon crû, sans doute le meilleur album d'Arno depuis longtemps.

Composé entre Ostende, sa ville d'origine, et Bruxelles, sa ville d'adoption à qui il rend d'ailleurs un très bel hommage, de par ce titre donné à l'album déjà, mais également à travers le rock déjanté qu'est "Brussels", Brussld alterne rock et ballades dépouillées, anglais et français, humour caustique et réalisme poignant. Les morceaux rock sont sans doute les plus immédiats et les plus porteurs. On pense à "Black Dog Day", déjà cité et tout à fait réussi, "Brussels", bien sûr, single on ne peut plus évident, mais "God Save The Kiss", électro rock à l'urgence à peine voilée est tout aussi impeccable. Quant à "Le Lundi On Reste Au Lit", repris en anglais en titre caché, s'il est loin d'être le plus intéressant musicalement parlant, il restera, à n'en pas douter, comme le plus drôle et le plus entraînant, un véritable hymne déglingué à reprendre en choeur un soir de cuite... Mais les vrais joyaux de Brussld sont les titres lents. "Quelqu’un A Touché Ma Femme" - et la grâce a touché Arno pourrait-on ajouter - est sublime de dépouillement et d'émotion, "Elle Pense Quand Elle Danse" est un abîme de tristesse insondable qui vous colle des frissons plein la nuque, "Ginger Red", seul morceau lent en anglais, est poignant et "Mademoiselle", en quasi talk over sur une première partie épurée jusqu'à l'os, évolue vers une valse de bastringue comme seul Arno sait en trousser. Rien à redire, tous ces titres sont magnifiques et leurs arrangements absolument fabuleux...

On ne peut terminer cette chronique sans évoquer l'impeccable reprise "Get Up, Stan Up". On n'avait jamais pensé à cet hymne de Bob Marley sous cet angle. Arno s'approprie avec classe ce grand classique, le déstructure complètement pour en faire quelque chose de totalement nouveau mais porteur d'autant de force que l'original finalement avec cet accompagnement élégant au piano, un piano qui nous fait penser à du Satie.

Force est de constater qu'Arno n'a pas dit son dernier mot. Chapeau bas mister Hintjens !

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