En dix ans, Hawksley Workman, artiste prolifique s'il en est (douze albums au compteur) aura tout fait,
pop, country, rock, hip hop, glam, cabaret... Autant dire qu'on ne sait pas ce que l'on va trouver dans cette nouvelle production
losqu'on pose le CD sur la platine. Pour préciser un peu les choses, signalons que Meat arrive dans le commerce sous la
forme d'un double album intitulé Meat/Milk. Vingt-deux nouvelles chansons à se mettre sous la dent. Chaque disque a son humeur,
Meat, plutôt sombre et introspectif, Milk plus sautillant à ce que l'on a cru comprendre. Mais, n'ayant pas eu l'occasion
d'entendre ce dernier, nous n'évoquerons que Meat.
Comme Adam Green
l'an dernier, Hawksley Workman a vécu récemment une rupture douloureuse. Et comme pour l'Américain, cet épisode
délicat de sa vie privée a eu des effets bénéfiques sur sa musique. Comme quoi, la déprime a du bon parfois ! Oubliés la démesure, les
hymnes pour stade et le son FM... Meat s'ouvre sur "Song For Sarah Jane", calme ballade au piano, sorte de lente supplique.
Mais ce serait mal connaître le lascar que de penser qu'il va se la jouer amoureux transi et nous sortir ce genre de morceaux à longueur
d'album. Dès lors, c'est un véritable maelström d'influences contraires que le Canadien va convoquer au gré de ses envies. Rock fusion
teinté de prog ("You Don’t Just Want To Break Me") qui se coltine un son crade limite garage ("Chocolate Mouth") ou se frotte à du funk
("And The Government Will Protect The Mighty"), pop déjantée d'inspiration 70's ("Tokyo Bicycle"), ballade electro funk lascive ("Depress My
Hangover Sunday"), flow hip hop ("We’ll Make Time"), ballade romantique chantée d'une voix de crooner ("Baby Mosquito")...
Ce touche à tout insatiable se balade avec aisance à travers tous les styles et s'il s'égare un peu parfois (le refrain ridicule
de "French Girl In L.A." qui vient tout flanquer par terre, le côté emphatique un peu vain de "The Ground We Stand On"), il parvient
encore à nous bluffer et c'est là l'essentiel. Témoin le magistral "You Don’t Just Want To Break Me", chanson de huit minutes qui
démarre sur le ton de la ballade avant de partir tranquillement en vrille. Au bout de trois minutes le texte se résume au seul titre
de la chanson, répété à l'envi, crié puis hurlé tandis que la guitare mouline un solo héroïque. Impressionant ! Dans son genre,
"Baby Mosquito" n'est pas mal non plus. Torride et glam, Hawksley Workman nous rappelle Rufus Wainwright ou, à
certains égards, le Prince de Purple Rain. Bref, Meat est un album tout ce qu'il y a de plus honorable et personne ne s'en
plaindra...
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