Avec ce troisième album qui clôt un triptyque entamé voici cinq ans avec Pomaïe Klokochazia Balek, Nosfell
poursuit sa recherche aussi originale qu'exigeante. Toujours accompagné de Pierre Le Bourgeois, violoncelliste
extraordinaire et arrangeur de haute volée, qui co-compose et joue également de la basse, Nosfell s'est ici adjoint les services du
batteur Orkhan Murat. Pour enregistrer ce dernier volet de la trilogie Klokochazia, Nosfell a choisi de s'exiler à Los Angeles. Il a
confié la production de l'album à Alain Johannes, producteur et bassiste de Queens of the Stone Age. Pas étonnant que
ce Nosfell là sonne résolument rock et résonne d'une énergie électrique que n'avait pas l'album précédent, le superbe
Kälin Bla Lemsnit Dünfel Labyanit.
L'album s'ouvre sur l'entraînant "Lugina". La voix haute, très haute de Nosfell, aussi cristalline que celle d'un enfant,
nous cueille et l'on est immédiatement propulsé dans son monde imaginaire où l'on n'a aucun mal à se projeter. On ne pouvait rêver meilleure
introduction pour sceller nos retrouvailles avec cet artiste à la démarche artistique profondément honnête. C'est l'un des plus beaux titres
de Nosfell avec "Alajlis Alaj", "Bargain Healers", "La Romance des Cruels" ou "...Jüsila", rock électrique lorgnant volontiers vers le
lyrisme. On avoue un faible pour
"Alajlis Alaj", tout simplement le must de l'album. Le violoncelle comme une évidence, des lignes de basse et une rythmique
impeccables et, par dessus, la voix de Nosfell qui passe du grave à l'aigu le plus extrême... Génial !
Deux mots encore de "Bargain Healers", seul morceau en anglais, et "La Romance des Cruels", en français, titres
sur lesquels Nosfell s'est ouvert à d'autres univers. "Bargain Healers", sorte de ballade rock médiévale, voit la
rencontre de Josh Homme,
chanteur des Queens of the Stone Age et de Brody Dalle, ex-chanteuse des Distillers. C’est la première fois
que ces deux-là, mari et femme en privé, se retrouvent sur un même disque. Le résultat n'est pas sans faire penser à du Tom Waits, un
artiste que Nosfell parait apprécier. "Your Elegant Hat", sur l'opus précédent, ressemblait furieusement à un hommage... Sur
"La Romance des Cruels", Nosfell frotte son univers poétique et sombre à celui, fracassé, de Daniel Darc. Il
en sort un bouquet de fleurs vénéneuses que l'on se fait un plaisir de cueillir...
Nosfell, entier et généreux, est allé jusqu'au bout de ses envies. Une page va sans doute se tourner... On
attend la suite avec une certaine curiosité. Vers quel chemin nous entraînera cet artiste hors norme ? L'avenir nous le dira...
Pour le moment, profitons de cet album !