Avec ce deuxième album, SayCet s'affirme comme le petit prince d'une électronica aussi délicate qu'élégante, le champion d'une électro rêveuse et minimaliste. Loin de jouer la continuité en s'enfermant dans le schéma défini avec One Day At Home en 2006, disque qui lui avait attiré les louanges de toute une presse spécialisée volontiers encline à un certain élitisme, Pierre Lefeuvre a évolué. Il a ouvert son univers en invitant Phoene Somsavath à venir poser sa voix sur des compositions peut-être un peu plus pop. Certains crieront à la trahison, d'autres appécieront...

Through The Window s'ouvre et se referme sur deux instrumentaux calmes et mélancoliques. "15" nous fait pénétrer de plain-pied et de fort belle manière dans l'album. La filiation avec One Day At Home est évidente et, très intelligemment, SayCet, sachant qu'il sera forcément attendu au tournant, affirme "voyez, je n'ai pas vraiment changé". "A Night With The Trees", tout aussi posé, soutenu d'un piano omniprésent qui nous fait parfois penser au Sébastien Schuller de Happiness, confirme. SayCet n'a pas changé. Il sait toujours produire une ambient intelligente, complexe et fragile. Il a juste enrichi sa palette... Témoins ces dix autres titres que l'on peut séparer en chansons, quasi instrumentaux et comptines électro.

Du côté des chansons, "Easy", "Bruyère", "Sunday Morning" ou "Fire Flies". Sur "Easy" et "Fire Flies", très beaux, contemplatifs et éthérés, la voix de Phoene Somsavath fait frémir les eaux calmes d'un lac, frissonner les anges et nous entraîne dans ses volutes vaporeux. On se laisse volontiers emmener, heureux de se retrouver dans un état proche de l'apesanteur. Si "Bruyère" emprunte le même chemin qu'"Easy", on ne peut s'empêcher de le trouver un peu répétitif, un poil ennuyeux et dénué d'émotion. "Opal", "Daddy Walks Under The Snow" ou "Kien-Lang" sont de ces quasi instrumentaux où la voix est utilisée plus comme un instrument que comme un vecteur de message. On pense parfois à Sigur Rós ou à de petits intermèdes qui composeraient la BO d'un road movie onirique. "We Walk Fast" et "And Mama Said : It's Amazing" prennent la forme de petites comptines électro. Pleines de boucles, samples, bidouillages et bruits en tout genre, hantées par cette voix triturée jusqu'à n'être plus qu'un squelette, ces ballades seraient les compagnes sonores idéales de personnages imaginés par Tim Burton. On le voit, l'univers créé par Pierre Lefeuvre est très cinématographique. Rien d'étonnant alors à ce que SayCet intègre également une vidéaste comme membre à part entière. Sur scène, Zita Cochet met en lumières et en images la musique de SayCet, en illustre la poésie, apportant une dimension supplémentaire à l'ensemble.

Enfin, on ne saurait clore cette chronique sans vous toucher deux mots de "Her Movie" (toujours ce rapport à l'image), notre morceau préféré. Instrumental montant tranquillement en puissance, "Her Movie" hésite constamment entre electro et post-rock. Ses balbutiements electro se retiennent d'aller de l'avant tandis que ses quatre petites minutes ne lui permettent jamais de réellement s'épanouir en un vrai post-rock planant. SayCet nous tient en haleine et on aime ça !

Les puristes n'aimeront sans doute pas le (léger) virage entamé par SayCet pour humaniser une musique parfois trop désincarnée. Force est de constater que nous l'avons apprécié...