Sébastien Schuller donne enfin une suite à Happiness... Trois longues années se sont écoulées depuis ce premier album enthousiasmant. Sébastien Schuller a pris son temps mais est loin de l'avoir perdu au vu du résultat que ce second opus nous laisse à entendre. Evenfall marque une sacrée évolution. Là où Happiness était le travail d'un homme seul, un peu introverti et replié sur lui-même, élaborant ses incroyables bidouillages électro pop dans son home studio, Evenfall est beaucoup plus ambitieux. Sébastien Schuller a voyagé, travaillé pour le cinéma, multiplié les rencontres... Evenfall s’est donc peu à peu enrichi. De nouveaux instruments ont fait leur apparition et, une fois n'est pas coutume, Sébastien Schuller s'est pris au jeu des collaborations. Résultat, cuivres, bois et cordes hantent l'album sur des orchestrations somptueuses. L'extraordinaire "Open Organ", par exemple, profite entièrement de ces changements. Arrangé par Bell Orchestre (side-project de Richard Parry et Sarah Neufeld d'Arcade Fire), ce titre me fait penser aux fresques symphoniques dont Sigur Rós a le secret. Morceau à l'instrumentation essentiellement classique, "Open Organ" commence doucement puis enfle progressivement pour terminer animé d'un certain souffle épique. Chapeau !

On retrouve d'ailleurs ce classicisme, aussi bien dans les orchestrations que dans le choix des instruments utilisés, dans toute la première partie de l'album. De "Morning Mist", principalement en clavier/voix, sorte d'intro un peu timide avant l'impressionant "Open Organ", en passant par le songe éveillé qu'est "Awakening" et jusqu'au grandiose "The Border", Sébastien Schuller a mis en sommeil son côté électro pour laisser parler son talent de mélodiste formé à la rigueur classique. Après "New York", ballade folk et bizarrerie instrumentale qui marque une pause au milieu d'Evenfall, vient la seconde partie de l'album. Si les disques avaient encore deux faces, "Battle", "Last Time", "Midnight" et "High Green Grass" constitueraient certainement la face électro d'Evenfall. Les rythmiques se font ici synthétiques - on pense à Depeche Mode sur "Battle" ou Tangerine Dream sur "High Green Grass" - les ambiances sont plus torturées ("Last Time" ou la rencontre de Cure et Radiohead) et les bruitages électro reprennent du service. Le Sébastien Schuller découvert sur Happiness est de retour...

Que l'on préfère la première partie ou la seconde (pour notre part, on garde tout), Sébastien Schuller force le respect avec cet album absolument lumineux. A noter que l'artwork n'a pas été oublié avec une pochette aussi belle que singulière et que l'on doit à Agnes Montgomery.